Rapine et débrouille

Rapine et débrouille

« Nous ne trouvons parfois plus de savon dans les commerces pendant une quinzaine de jours. Celui que nous octroie la libreta [le carnet de rationnement] est si petit qu’il est vite épuisé. » Lisbeth, jeune diplômée en médecine de l’Université de Cienfuegos, une métropole régionale de 160 000 habitants, dépose un dé de savon jaunâtre près de l’évier familial. La jeune Mulâtre de 26 ans habite Palmira, une bourgade déshéritée de la banlieue de Cienfuegos. Elle partage avec sa mère, María, et sa sœur, Maribel, les trois pièces d’une masure décatie dont les seules richesses sont un canapé défoncé et un frigidaire que la famille a toujours vu sur le sol de terre battue. Le père a quitté la maison quelques années après la naissance des enfants. María travaille comme surveillante à l’hôpital de Cienfuegos. Six jours sur sept, cette dynamique quinquagénaire patrouille dans les couloirs du centre hospitalier pour un salaire de 300 CUP (12 $) par mois... Comme pour tous les Cubains, ces revenus augmentent avec le marché noir, la corruption et la rapine généralisée des biens de l’État sur les lieux de travail.

Paru initialement dans Le Figaro