Istanbul, les détroits et la mer de Marmara Accueil / Contenus / Asie et Asie Mineure / Turquie / Istanbul, les détroits et la mer de Marmara Mosquée bleue, Istanbul, Turquie | © PocholoCalapre Ankara est peut-être la capitale turque, mais le cœur et l’âme de la Turquie se trouvent à Istanbul. La ville demeure encore aujourd’hui la métropole du pays, avec une population avoisinant les 9 millions d’habitants. C’est beaucoup pour un pays qui compte une soixantaine de millions de citoyens, accaparés pour la moitié par l’industrie agricole. Istanbul est aussi le principal port de mer turc, son centre culturel le plus important et un véritable bijou pour le touriste qui veut visiter et comprendre. Elle occupe un site exceptionnel sur la rive européenne, à la jonction du Bosphore et de la mer de Marmara. C’était d’abord un port naturel en eaux profondes. Ensuite, la ville pouvait aisément contrôler le trafic maritime entre l’Asie et l’Occident. Enfin, seul un côté de la cité aurait pu faire l’objet d’une attaque terrestre, un bras de mer, la Corne d’Or, protégeant tout le flanc est de la ville.Il court bien des légendes sur la création de la cité. La plus commune l’attribue à un marin grec, Byzas. Byzance lui devrait son nom. Mais c’est à Rome qu’elle doit sa véritable naissance. En 324 ap. J.-C., l’empereur romain Constantin prend la ville où s’était réfugié un rival. Il en fait sa capitale et y érige de puissantes murailles. La cité ne tarde pas à mener le train qui sied à son rôle politique. L’art, l’architecture et l’urbanisme romain président. Byzance devient Constantinople.À la fin du Ve siècle, les barbares ont réussi à prendre Rome, et Constantinople est désormais la seule gardienne d’une riche culture. L’Empire byzantin repoussera pendant cinq siècles ces envahisseurs, mais, en 1071, les Turcs musulmans seldjoukides parviennent à lui arracher l’Anatolie. Ils font de Bursa leur capitale, qui devient alors le point d’arrivée des caravanes en provenance d’Orient. Constantinople demeure toutefois le centre d’un empire réduit et cherche tout naturellement l’assistance des chrétiens occidentaux contre les musulmans. Mal lui en prit puisque ce sont précisément les croisés qui prendront la ville en 1204. La quatrième croisade répondait ainsi au souhait d’un de ses commanditaires, Venise, qui voulait éliminer une rivale dans le commerce avec l’Asie. Un royaume latin succède pour un temps à l’empire.De toute façon, Constantinople vit en sursis derrière ses murailles. Les musulmans ottomans ont succédé aux Seldjoukides et se sont employés à agrandir leurs possessions en profitant de la ville affaiblie. Ils prennent ainsi pied sur la rive européenne des Dardanelles, d’où ils envahissent la Bulgarie. En 1453, Mehmet le Conquérant met le siège devant Constantinople. Il fait porter ses navires par voie de terre pour contourner la chaîne qui barre l’entrée de la Corne d’Or et réussit ainsi à pénétrer dans la cité. Constantinople a vécu; Istanbul lui succède.Dans les siècles qui suivent, le peuple turc et son sultan règnent sur l’Empire ottoman, le plus important de l’époque. À son apogée, ses possessions incluent l’Afrique du Nord, la partie méridionale de l’Espagne, le Moyen-Orient et tout le Sud-Est européen jusqu’aux abords de Vienne. Au XXe siècle, cet empire s’effondre à la faveur de la Première Guerre mondiale. Les Alliés occupent la ville. En 1923, un nouvel État turc est créé, mais choisit Ankara pour capitale. Mustafa Kemal, dit Atatürk, devient ensuite le leader incontesté de cette nouvelle Turquie résolument tournée vers le modernisme.Le destin aussi grandiose que mouvementé de la ville se lit encore aujourd’hui dans les innombrables souvenirs que lui ont laissés ses empires. Certains d’entre eux sont les principaux emblèmes de la cité. Ils se trouvent dans la vieille partie de la ville, celle qui fait saillie entre la Corne d’Or et la mer de Marmara.C’est le cas d’une magnifique église consacrée à la Sagesse divine : la basilique Sainte-Sophie. En 532, l’empereur Justinien décide de la seconde reconstruction du temple originellement commandé par Constantin en 325. Mais Justinien entend bien en faire la plus magnifique construction de l’empire et il ne ménagera rien dans les cinq années qui suivront pour parvenir à son but. Tout ce que les civilisations romaine et byzantine avaient de meilleur est mis à contribution, autant pour les hommes que pour les matériaux. Il faudra près de 20 tonnes d’or pour tout payer, mais, le jour de l’inauguration, Justinien croit avoir atteint son objectif : surpasser Salomon.De l’extérieur, le bâtiment montre un aspect trapu, mais son intérieur révèle des perspectives grandioses. Le dôme central, qui représente la voûte céleste, fait 31 m de diamètre et est suspendu à 55 m au-dessus du sol. Il faudra attendre 1 000 ans et la construction de la basilique Saint-Pierre, à Rome, pour voir un bâtiment plus grandiose.Quatre piliers portent toute la charge, de sorte que l’espace central est remarquablement dégagé et que l’ensemble semble léger. Lorsque les musulmans conquirent la ville en 1453, Mehmet décide presque immédiatement de transformer l’église en mosquée. On lui adjoint ensuite ses quatre minarets et l’on masque les mosaïques intérieures. Sainte-Sophie est depuis connue sous le nom de "Hagia Sofia", et l’on peut la visiter de 9h30 à 17h tous les jours, sauf le lundi. Là comme dans tous les édifices religieux, il importe de respecter la nature des lieux par des vêtements corrects et une attitude digne.Quelques centaines de mètres plus à l’ouest se dresse l’une des plus belles mosquées du monde, celle érigée par le sultan Ahmed au début du XVIIe siècle. Elle incarne le zénith de l’Empire ottoman. Plus petite que Sainte-Sophie, la mosquée d’Ahmed est cependant beaucoup plus élégante, avec ses coupoles qui se succèdent pour créer les volumes. Les murs intérieurs sont recouverts d’une faïence qui a valu son nom à l’édifice : la Mosquée bleue (ouverte tous les jours, 8h à 18h).Tout à côté, les urbanistes de Constantinople avaient érigé un hippodrome. Aujourd’hui, la place At Meydani offre encore quelques-unes des plus belles images de la ville.L’autre grand pôle touristique de la cité est le palais du Topkapi (tous les jours, sauf le mardi, 9h30 à 17h), le fameux sérail d’où les sultans dirigeaient l’empire. On le trouve lui aussi à quelques minutes de marche de Sainte-Sophie.Il s’agit d’un ensemble de cours et de bâtiments. La construction s’est échelonnée sur plusieurs règnes, chaque souverain y laissant une marque plus élégante que son prédécesseur dans des styles très riches. On peut visiter le palais et les nombreux musées qu’il renferme, de même qu’une partie du harem.Dans la première cour du Topkapi se trouve le Musée archéologique (ouvert tous les jours, sauf lundi, 9h30 à 17h). Il s’agit d’un complexe de trois musées exposant des pièces fabuleuses. Ainsi, au Musée des antiquités, on peut voir un sarcophage qu’on a longtemps cru être celui d’Alexandre le Grand. Le Musée de l’Ancien-Orient, quant à lui, présente des vestiges venus tout droit de l’époque où Sumer, Babylone et l’Égypte servaient de phares à la civilisation.La vieille ville renferme encore bien des trésors. Également, tout près de Sainte-Sophie, les citernes de Yerebatan (tous les jours, sauf le lundi, 9h30 à 17h) méritent le détour. Elles ont été construites sous le règne de Constantin.Il faut aussi voir les fameuses murailles doubles qui ont protégé Constantinople pendant des siècles. Le mieux est encore de se rendre à la jonction entre ces fortifications et la mer de Marmara, au château des Sept Tours. Ensuite, on peut explorer les murailles et leurs portes jusqu’aux vestiges du palais de Constantin, sur la Corne d’Or.Sur la rive ouest de la Corne d’Or, les bazars s’ouvrent sur des rues étroites et tortueuses tous les jours sauf le dimanche, et ce, de 9h à 19h. C’est l’endroit rêvé pour oublier d’où l’on vient et à quelle époque on vit. Pour faire ses emplettes, il y a aussi deux quartiers commerçants à signaler, à savoir Aksaray et Laleli, juste de l’autre côté de la place de l’Université.En traversant la Corne d’Or, on change de monde. C’est la ville européenne qui est construite ici. Gênes, notamment, a jadis conclu des accords commerciaux avec l’Empire bysantin. Les Génois avaient fortifié tout le quartier de Galata, et il demeure de ces ouvrages une tour (8h à 21h) haute de 68 m d’où l’on peut découvrir une vue unique sur Istanbul. Elle est heureusement équipée d’un ascenseur.Le palais de Dolmabahçe mérite à lui seul que l’on s’éloigne de la vieille ville pour gagner la rive nord du Bosphore, où il fut terminé en 1855. C’était la demeure du sultan Abdülmacid Ier, qui a voulu lui faire jouer un rôle un peu équivalent à celui de Versailles. Pas étonnant qu’on y retrouve en grand nombre, et dans des styles variés, toutes sortes d’objets destinés à épater la galerie, dont bon nombre d’horloges, aucune d’entre elles ne donnant toutefois l’heure. Mustafa Kemal est mort ici, et toutes les pendules ont été arrêtées à l’heure de son dernier soupir. La visite guidée s’impose pour voir bon nombre des 285 pièces du palais.Comme toutes les métropoles, Istanbul vit à son propre rythme, un peu en porte-à-faux avec celui du pays lui-même. Marcher lentement, s’arrêter sur les places, négocier âprement ses achats, ce sont là autant de façons de prendre le pouls de la ville. Si l’on manque de temps, la meilleure manière d’emmagasiner des images est encore d’opter pour une excursion en bateau, d’où l’on verra mieux le site dans son ensemble. Il y a des départs tous les matins depuis les quais d’Eminönü, sur la rive ouest de la Corne d’Or. Différents trajets permettent de se faire une bonne idée d’ensemble de toute l’agglomération urbaine et du Bosphore.Au sud de la mer de Marmara, à une centaine de kilomètres d’Istanbul, les premiers Ottomans ont fait de Bursa leur capitale. C’est encore aujourd’hui une charmante cité de plus de 400 000 habitants. On y trouve tout ce qui fait la ville turque dans l’imaginaire occidental : des rues étroites, des mosquées, des hammams (les fameux bains turcs), des mausolées, des bazars et des maisons d’architecture orientale. Les jardins et les parcs de la ville ainsi que ses faïences vertes lui ont valu d’être associée à cette couleur.Les caravanes lui ont apporté d’Orient la prospérité et le Bombyx mori, le ver à soie. Le textile est d’ailleurs encore au cœur de l’activité économique de la ville. Des caravansérails bordent encore le grand marché de la ville; ces complexes comprennent des magasins, des comptoirs et des hôtelleries. Le plus grand des caravansérails, Koza Hani, s’anime encore à la fin de juin, lorsque les paysans des environs apportent les cocons pour la vente annuelle.Parmi les attraits touristiques les plus dignes de mention, citons la Mosquée verte, la colline de la Citadelle, les anciens bains du quartier de Cekirge et la mosquée Ulu Cami. Le quartier de Tophane, dans la plus vieille partie de la ville, mérite à lui seul une longue promenade qui permet d’apprécier l’architecture des vieilles résidences ottomanes, traditionnellement construites en bois. Toutefois, si c’est la perspective d’expérimenter le bain turc, le fameux hammam, qui intéresse le visiteur, il peut être intéressant de pousser sa visite dans les faubourgs ouest de la ville, où des sources d’eau chaude donnent encore vie à de très anciens établissements.