Dialogue avec Teresa Pérez sur ses 150 plus beaux jardins du monde

Les 150 plus beaux jardins du monde : les incontournables de Teresa Pérez

Docteure en études hispaniques, Teresa partage ses jours entre deux villes, Séville et Montréal, et plusieurs passions : l’enseignement, l’écriture, les voyages et la découverte de jardins aux quatre coins du monde. Après une décennie d’enseignement à l’Université de Séville, elle quitte les salles de cours pour s’engager dans une carrière d’écrivaine indépendante au fil de longs séjours en Asie et en Amérique latine. Professeure invitée à l’Université de Florence et à l’Université de Montréal, membre du Centre de Recherche sur la Littérature des Voyages, elle participe à de nombreux colloques internationaux sur la culture hispanique. Ces dernières années, elle a réalisé un travail d’étude et de diffusion sur le jardin japonais avec diverses lectures, conférences et cours de maître en aménagement paysager. Auteure d’ouvrages de critique littéraire, elle a aussi signé Comprendre l’Espagne en plus de contribuer à la rédaction des livres de voyage Les 150 plus beaux jardins du monde et Fabuleuse Espagne méditerranéenne chez Ulysse.

J’apprécie beaucoup l’allure naturelle, ces jardins où la main du jardinier n’est pas trop évidente, mais qui paradoxalement sont le fruit d'une longue planification, car rien n'y est laissé au hasard. Également, ma préférence va aux aménagements qui laissent la place à l’imagination, ceux qui ne montrent pas tout d’emblée, nous incitant ainsi au jeu de la découverte.

Après quelques expériences avec des jardins trop achalandés, je dirais que le meilleur moment est celui qui permet d'éviter les foules (tôt le matin ou peu avant la fermeture). Certains types de jardins (jardins chinois ou hispano-musulmans, par exemple) s’accommodent mal des multitudes.

Le Jardin formel, dont le design joue avec la symétrie et les formes géométriques, séduit par l'élégance de ses massifs fleuris comme par ses jeux de perspective.

Le jardin paysager ou « à l’anglaise » met l’accent sur l’apparence naturelle : étang, rocailles, belvédère, ruisseaux se suivent dans un désordre habilement orchestré.

Et finalement, le jardin musulman, intime, à taille humaine, et appelant à tous les sens - la vue, l'odorat, l'ouïe, même le toucher- pour recréer une ambiance de quiétude.

Ninfa, au sud de Rome. J’aime les ruines et ce jardin aménagé sur les vestiges d’un village médiéval. Il porte la trace de plusieurs générations de femmes qui lui ont donné une âme. Ce serait un privilège de vivre dans un endroit aussi imprégné de poésie.

Sans réfléchir, je mentionnerai une ville, Kyoto, où chaque complexe de temples abrite de sublimes jardins. Et s’il fallait en choisir un, ce serait celui de la villa princière de Katsura, pur raffinement : jamais ailleurs je ne me suis sentie aussi bien guidée de surprise en surprise par la main savante et invisible du concepteur du jardin.

El Jardín Escultórico Edward James, à Las Pozas, pour son architecture surréaliste se fondant si harmonieusement dans la forêt tropicale de Xilitla, au Mexique. La réalité dépasse de loin les images déjà vues.

Les fougères arborescentes, que ce soient les Dicksonia ou les Cyathea, dont l’allure exotique et aérienne nous transporte aux tropiques… sans escale.

Les Japonais ont conçu un type de jardin spécifique pour la cérémonie du thé, le roji. À Kyoto, il ne faut pas manquer l’expérience de goûter un matcha en contemplant, depuis le pavillon de thé, un aménagement paysager empreint de sérénité.

La Quinta de Regaleira, à Sintra, Portugal, qui plaira aux petits comme aux grands. C’est un enchantement où l’on découvre des éléments de la franc-maçonnerie et de l’alchimie et où on évolue, en ayant comme guide la Divine Comédie de Dante, vers les profondeurs de la Terre – l’emblématique puits d’initiation ne sera pas vite oublié.

L’univers botanique recèle encore bien des merveilles et des secrets. Récemment, on a appris un peu plus sur le génome qui permet au résilient Welwitschia mirabilis, une relique du Crétacé, de subsister dans un environnement des plus hostiles. Cette plante, qui est en réalité un conifère, n’a que deux feuilles qui peuvent pousser pendant 2000 ans. Dans des périodes d’extrême sécheresse, la Welwitschia aurait simplifié son code génétique pour mieux s’adapter. Étrange et pas très gracieux, j’ai pu le voir dans le Jardin botanique d’Amsterdam, mais il est endémique du désert du Namib.

J’en choisirais au moins deux : un classique, la villa d’Este, une vaste succession de jardins commandités par le cardinal Ippolito d'Este qui incarnent l'âme de la Renaissance italienne; et un contemporain, Little Sparta, où l'artiste Ian Hamilton Finlay associa avec bonheur une grande diversité d’espèces botaniques avec des sculptures et des inscriptions poético-philosophiques, dans un paysage à l’écart du monde.

Les jardins et le Palais de Versailles, emblèmes du pouvoir de Louis XIV. Cependant, cette réalisation pharaonique de Le Nôtre n’incarne pas seulement l’absolutisme du Roi Soleil : son évolution et ses ajouts successifs nous racontent l’histoire de la France - incluant le séisme de la Révolution de 1789 ou les aspirations impériales de Napoléon - et même celle de l’Europe, car ce fut à Versailles qu’on signa, en 1919, le traité de paix qui allait mettre fin à la Première Guerre mondiale.

Vérifiez le calendrier de floraison des jardins, souvent disponibles sur leur site Internet, un outil précieux pour connaître les visages changeants des jardins au fil des saisons et qui vous évitera, par exemple, de visiter l’explosion de tulipes de Keukenhof ou les fééries de Giverny au mauvais moment…

Pour plus de renseignements sur les jardins dans le monde, consultez Les 150 plus beaux jardins du monde.